Catégories
ÉCHO Magazine

Notre langue maternelle, notre patrie

« Merci und uf viderluege im schöne Vallée de Joux » c’est ainsi que j’ai clôturé la conférence intitulée « Dégustation de son » un jeudi soir à Zoug pour dire « Merci et au plaisir de vous revoir dans la belle Vallée de Joux ». Mon compagnon qui était dans la salle, vient vers moi et me dit : « L’émotion était à son comble ! Tu es parfaite en français, mais en suisse allemand, c’est toujours plus émotionnel ! »

Même si je suis née et que j’ai grandi en Suisse romande, j’ai parlé suisse allemand à la maison et je n’ai appris le français qu’en allant à l’école. Même si je maîtrise mieux le français, j’ai toujours été tentée de parler le suisse allemand dès que l’opportunité s’offrait à moi ou s’il y avait un soupçon d’accent chez mon interlocuteur. Cela m’apporte beaucoup de joie, tout comme à la personne avec qui j’échange. Je crois que c’est parce que je me sens chez moi dans cette lanuge, c’est « Heimelig » (confortable comme à la maison) comme le disent les Suisses alémaniques.

D’ailleurs, il est dit que l’intelligence émotionnelle se développe entre un et cinq ans chez l’enfant et que c’est pour cette raison qu’il est important de conserver notre langue maternelle et d’y retourner régulièrement. Par exemple, si je me dis « j’ai du courage », cela sonne bien mais si je dis « ig ha Muet », je le sens vraiment dans mes tripes car j’utilise ma langue émotionnelle. J’ai très vite appris d’autres langues comme l’italien et l’anglais toujours dans le but de pouvoir communiquer avec les gens. C’est en parlant la langue de l’autre que nous entrons plus profondément en contact lui. C’est pour cela également que j’ai appris le japonais, pour changer quelques mots avec mes clients. Et c’est toujours une autre relation qui s’installe …

Mon compagnon de vie est néerlandais et suisse. Même s’il habite en Suisse depuis longtemps et qu’il parle le français, je le sens plus authentique et je l’aime encore plus dans sa langue maternelle. Lui a peur d’être trop dur dans sa version néerlandaise, mais dans le fond, il plus vrai et j’aime sa facette « néerlandaise » que je ne perçois que quand il parle sa langue maternelle.

Enfant, je souffrais de ne pouvoir dire que j’étais complètement romande, ou suisse alémanique. Je n’étais pas une demi-portion tout de même ! Dès lors, j’ai décidé que comme pour l’amour pour nos enfants qui ne se divise pas dès que nous en avons deux ou plusieurs, l’amour pour nos racines ne se divise pas non plus. Et depuis lors, j’ai dit joyeusement que je suis cent pour cent romande et cent pour cent suisse alémanique ! Et cette richesse me remplit de joie et de force.